Des habitants du quartier et de la ville, Alban, Alexandre, Anina, Camille, Céline, Charifa, Christine, Chloé, Clorinda, Delphine, Élise, Fabien, Flora, Frédérick, Haciba, Héloïse, Idir, Isadora, Jalila, Joe, Kelly, Khadidja, Marina, Matthieu, Nathalie, Nicolas, Olivier, Pascal, Sarah, Thérèse, Yves, Zouhal, qu'il soient étudiants ou autodidactes, travailleurs ou chômeurs, nés français ou d'adoption, hommes et femmes de tout âge (de 17 à 65 ans...) se sont retrouver pendant neuf semaines pour monter une pièce de théâtre d'Armand Gatti, issue de la Traversée des langages, au théâtre Jean Vilar de Montpellier...

Cet atelier a réuni 25 Montpelliérains et les 6 membres de l'association Idéokilogramme. Nous avons travaillé dans le quartier Mosson-Paillade, à la Maison pour tous Léo-Grange, au centre social de la Caisse d'Allocations Familiales et dans les locaux de l'association Musique sans frontières.

Ce projet a reçu le soutien de la Ville de Montpellier, du Conseil Général de l'Hérault, du Conseil Régional Languedoc-Roussillon et de la Direction Régionale des Affaires Culturelles du Languedoc-Roussillon. Nous vous invitons à lire le dossier de présentation de l'atelier.

jeudi 8 avril 2010

Deuxième semaine (du 22 au 28 février 2010)

"Les Hypothétiques. - Dans cette possibilité d’opéra où la dernière nuit de Jean Cavaillès répond à la dernière nuit d’Evariste Galois, nous groupes Commutatifs, Cycliques, Hypothétiques, nous sommes les signes fantômes (ou non) du Livre sur la théorie des groupes qui n’a pas été écrit.

Les spectateurs virtuels interrompent.

Les Associatifs. - Et nous ? Le groupe des Associatifs ?"
C'est avec ces deux répliques d'ouverture que la mise en scène de cet opéra "quantique" (en tous les cas, sa possibilité...) est lancée ce lundi 22. Les groupes y ont remplacé les personnages. Ils nous sont d'emblée présentés :
  • les Commutatifs (particules du monde de la physique quantique aux identités multiples, à la fois chiffres - issus des calculs - et pronoms - issus de la grammaire),
  • les Cycliques (figures mythologiques - statues de cathédrales, animaux fantastiques, etc. - qui ont marqué la vie du résistant Jean Cavaillès),
  • les Hypothétiques (associées au raisonnement déductif, les hypothèses sont le principal outil du scientifique : ce groupe veille aux différentes démonstrations du spectacle),
  • et les Associatifs (spectateurs assis parmi le public ; réactions "à chaud" de mathématiciens, d'ouvriers, de physiciens, de logiciens, de poètes, de théologiens...)
Une esquisse de distribution est proposée en début de semaine. Chacun découvre son groupe, avec qui les répliques sont partagées. Premiers mouvements : chiens, chevaux, gazelles, éléphants, chameaux, bientôt rejoints par les kangourous et les athlètes, envahissent le plateau. C'est la tentative d'une danse des animaux du livre que la mathématicienne Emmy Nœther offrit à Cavaillès... Puis travail sur la parole chorale, d'adresse au public, à ses partenaires, etc. Très vite (dès la deuxième page), le tout premier chant, "Le Cinq qui se répond à lui-même", est mis en place dans la continuité de l'ouverture de la pièce.

Chaque matin, l'apprentissage du maniement du bâton long se poursuit, les enchaînements de bâton court (inspirés du sabre shaolin) sont présentés : ça gambade, ça virevolte, dans les airs, au ras du sol... Mercredi, joyeuse après-midi d'inauguration de l'atelier de création plastique. Les pinceaux, la peinture, les châssis toilés sont de sortie pour la réalisation des "Qui je suis?".


photos Joe Dasnière

Les bases, de ce qui constituera toute notre approche créative, ont été posées... En effet, nous avons du prendre toute cette semaine pour ne travailler que les trois premières pages de la pièce qui condensent à la fois danse avec les bâtons, chant choral et scène d'exposition. Il s'agit comme d'un spectacle avant le spectacle, qui n'en sera pas un au sens classique du terme, puisque suites de questionnements et de tentatives de représentations, par les groupes, des destins "symétriques" de Jean Cavaillès et Évariste Galois.

Vendredi soir, nous nous quittons impatients de nous retrouver lundi, pas mécontents non plus de profiter de deux jours de relâche, avec en esprit ce texte dense et riche de la traversée des langages, qui commence peu à peu, sous nos yeux, à prendre forme, consistance et sens!

Pascal :
Je m'aperçois à la relecture de la traversée des langages que la barre est perchée très haut. Je me dis qu'il faut se mettre au travail et accélérer le jeu. L'effet passe à dix sinon rien. Le public devra être pris à la gorge car la mathématique évoquée est une rébarbation très commune. Je crois que nous sommes là à cause d'une profonde affection envers Evariste, Jean, Emmy et Armand Gatti. Je crois que nous transportons la plainte inextricable du chagrin de la guerre. Nous sommes là pour avancer que le nazisme est encore en vie, et que nous n'en sommes pas conscients. C'est là, et immédiatement la société refoule. Je n'ai jamais pu accepter que la police française n'ait pas connue de purge après la guerre. Et pourtant, comme on dit : nous sommes condamnés à vivre ensemble.

Je commence à apprécier la gymnastique et la barre de bois ; d'ailleurs je vais essayer de continuer après le test. J'aime profondément ce que nous tentons dans cette expérience ; je crois que c'est aussi le cas pour tous les stagiaires. C'est ce que je ressens. Même si ça se frite un peu entre l'arrière et l'avant de la cohorte.

Mercredi, j'accueillais Frédo, Sarah et Marina dans l'émission de radio que j'anime et dont le créneau c'est la poésie. Émission joyeuse, vaste, rigolote et très très poétique ; pour moi la meilleure depuis le début en Juillet. On recommence dans dix jours ; nous essaierons de davantage parler de la pièce et de son auteur, tout en gardant cette bonne humeur.

Pas mal d'absents ; et quelques très fidèles. Les beaux jours reviennent ; nous pourrons aller jouer dans la grande cour de l'ancien Mas de la Paillade devenu la Maison pour Tous Léo Lagrange, électron libre dans le système municipal. Je me dis que peut-être maintenant il faut mettre le paquet dans l'apprentissage du texte et des répliques. J'ai compris l'émotion que nous tentons d'induire.

Voilà, la locomotive est lancée, nous allons nous caler sur la grande vitesse de croisière, le jeu en vaut la chandelle. Je crois que l'école de cinéma veut nous filmer et qu'on ne sait trop quoi en penser. Je profite de ce carnet de route pour exprimer que ce serait une trace intéressante, et qu'à ce niveau encore, je suis très positif.

Ça faisait longtemps que j'étais sans travail ; et je suis très heureux d'être claqué chaque fin de semaine. Cette pièce est un peu le voyage du pourquoi pas. Ramer est une évidence. Alors ramons.

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