Des habitants du quartier et de la ville, Alban, Alexandre, Anina, Camille, Céline, Charifa, Christine, Chloé, Clorinda, Delphine, Élise, Fabien, Flora, Frédérick, Haciba, Héloïse, Idir, Isadora, Jalila, Joe, Kelly, Khadidja, Marina, Matthieu, Nathalie, Nicolas, Olivier, Pascal, Sarah, Thérèse, Yves, Zouhal, qu'il soient étudiants ou autodidactes, travailleurs ou chômeurs, nés français ou d'adoption, hommes et femmes de tout âge (de 17 à 65 ans...) se sont retrouver pendant neuf semaines pour monter une pièce de théâtre d'Armand Gatti, issue de la Traversée des langages, au théâtre Jean Vilar de Montpellier...

Cet atelier a réuni 25 Montpelliérains et les 6 membres de l'association Idéokilogramme. Nous avons travaillé dans le quartier Mosson-Paillade, à la Maison pour tous Léo-Grange, au centre social de la Caisse d'Allocations Familiales et dans les locaux de l'association Musique sans frontières.

Ce projet a reçu le soutien de la Ville de Montpellier, du Conseil Général de l'Hérault, du Conseil Régional Languedoc-Roussillon et de la Direction Régionale des Affaires Culturelles du Languedoc-Roussillon. Nous vous invitons à lire le dossier de présentation de l'atelier.

jeudi 1 avril 2010

Neuvième semaine (du 12 au 16 avril 2010)



Khadija :
Nous sommes le 15 avril, le grand jour pour les participants à l'expérience... au théâtre Jean Vilar, à Montpellier.

La pression est à son comble mais l'ambiance est bonne enfant... quelques victuailles trainent par ci, par là.... Chloé n'a pas mangé de toute la journée, alors elle reprend des forces avant la bataille.
Martine a amené sa trousse de maquillage et elle s'improvise maquilleuse de tout le groupe, après avoir été chauffeur d'Armand Gatti.
Nous nous complimentons les uns les autres « tu es belle, on dirait une reine égyptienne ». Pourtant elle est la chimère de Saint Sernin dans la pièce. Quel rapport ? On n'en sait rien, juste le fait du hasard, non, plutôt l'expression de nos émotions de l'instant. Toutes les tensions qui ont existé entre nous s'estompent, nous sommes UN.
Elles sont toutes belles, chacune a son style, ils sont tous charmants et nous encouragent, nous consolent parfois comme ils peuvent…. On se communique les énergies positives, notre affection les uns pour les autres.... Chaque sous groupe se consolide, se donne des forces comme si on allait entrer dans un stade de rugby.
Héloise nous fait une séance de relaxation.... Juste avant l'entrée en scène, on se regroupe, on fait bloc, avec nous toute l'équipe (Marco, Fabien, Matthieu, Fredo, Héloise), Yves dit « je voudrai vous poser juste une question ? », je ne me rappelle pas la question, en revanche je sais que nous avons répondu par une même voix OUI.
Personne ne manque à l'appel, tous sont là, prêts à sauter le pas et à devenir l'Expérience de Montpellier.
Il est 19h, le public est devant les portes du théâtre, les spectateurs virtuels se placent, derrière eux Armand Gatti qui insuffle sa force tranquille. Il est là le grand Gatti dans un théâtre qui porte le nom de celui qui lui a donné sa chance, la possibilité de présenter sa première pièce iconoclaste, dérangeante à l'époque.
« J'ai l'impression que je ne connais plus mon texte, je crains de tousser en plein jeu », « C'est normal, ne t'inquiète pas », me dit Céline.
Les mains dans les mains comme un seul homme, assis au premier rang, nous, spectateurs virtuels communiquons par vibration et Yves nous invite à rester concentrés.
Et puis l'heure a sonné. Les amis, que nous avons conviés, pénètrent à l'intérieur, ils sont nombreux et cela fait plaisir. Leur affection nous fait du bien, nous porte tout au long du spectacle. Nous allons donner le meilleur de nous mêmes.
S'éteignent les lumières et le chant commence « les yeux des mots », du chanteur égyptien et engagé Cheikh Imam :

Quand le soleil se noie dans une mer de nuages
Que s’étend sur le monde une vague de ténèbres
Que meurt le regard dans les yeux et les consciences
Que se perd le chemin en détours et méandres
Toi qui marches, qui cherches, qui comprends
Tu n’as plus d’autre guide que les yeux des mots
(traduction faite par une amie Dahbia Foudili).

Se lance la farandole des animaux de la Traversée des langages et le spectacle commence.
On y est.... pendant une heure et demie, sans interruption et le plus surprenant tout le monde connait son texte ; moi je n'ai pas toussé une seule fois. Impressionnant!
La fin, les lumières s'allument et applaudissements du public. Nous avons réussi l'expérience. Cela nous fait un bien fou.
Demain, un autre jour, une autre représentation.

« Mais que deviendrons nous après ? », question posée, par Delphine, qui n'a pas eu de réponse.
La réponse est sans doute dans ce que nous a appris l'expérience et le groupe sur nous mêmes. Je ne résiste pas à vous faire partager ce texte adressé à Yves et qui n'a pas été publié.

"Deux sémites au milieu de la Traversée."

Détruisons les murs qui nous séparent et édifions des ponts entre nos cultures, nos religions, nos croyances, nos langues, nos héritages si différents.
Un pont qui s’érige fait moins de bruit qu’un mur qui tombe.
La construction d’un mur ne sollicite aucune fantaisie, il suffit d’honorer la loi de la pesanteur.
Les murs aveuglent, impliquent des camps d’internement et confortent les rancœurs.
L’édification des ponts stimule les grandes fraternités, parce qu’il faut vaincre la résistance de la pesanteur.
Un pont qui s’érige fait moins de bruit qu’un mur qui tombe.
Des murs se lèvent : les murs des idéologies, des idées préconçues, des douleurs, des dédains, des animosités, des hostilités….
Des murs des divisions, des murs des répulsions.
Comment résoudre alors la difficile équation du lien rompu, cassé ?
Un pont qui s’érige fait moins de bruit qu’un mur qui tombe.
Les ponts permettent de relier deux rives séparées par les remous envahissants des mers.
Il faudra passer un pacte avec les océans pour que se façonnent d’autres existences contre les courants tumultueux, dévastateurs.
Un pont qui s’érige fait moins de bruit qu’un mur qui tombe.
Des murs s’écroulent sous la poussée de la résistance.
Pour que les peuples puissent se croiser, échanger, se découvrir, s’écouter pour se comprendre et s’accorder.
Un pont qui s’érige fait moins de bruit qu’un mur qui tombe.
Faisons démolir tous les murs des dissensions et construisons des ponts de réconciliation.
Les ponts encouragent la traversée des barrières, des démarcations.
Jetons des passerelles entre les différentes cultures, pour recoudre les fils du dialogue.
Un pont qui s’érige fait moins de bruit qu’un mur qui tombe.
La marche des hommes est toujours plus puissante que l’architecture des murs.
Les murs entrainent les contournements comme tout enfermement. Ils convient à la rébellion, à la désobéissance…. A objecter, à explorer des idées, à refuser le compromis. A RESISTER.
Un pont qui s’érige fait moins de bruit qu’un mur qui tombe.

2 commentaires:

  1. Deux mois de cris et chuchotements à bâtons rompus devant le grand miroir ou sur le plateau, deux mois de parcours du combattant sur les traces de Cavaillés et Gallois dans le transept de la cathédrale de Strasbourg, deux mois pour reconstituer le puzzle de la poétique gattienne où le chant des oiseaux enfin libéré du carcan du texte à rejoint, au delà des mots, l'équation des corps, vibrante alchimie, ô combien VIVANTE !
    Bravo,
    Joe

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  2. crédit photos: dominique Leblon

    à bientôt!!!!

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